La divinité de Jésus
Jésus est appelé θεος, Dieu
Thomas lui répondit: Mon Seigneur et mon Dieu! Jésus lui dit: Parce que tu m’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru!
Jn 20.28-29
Thomas appelle Jésus son Dieu, et Jésus ne le reproche pas pour ça, mais observe que, par cette confession, Thomas a cru. On ne peut pas dire que Thomas parle au Père, parce que sa réponse est dirigée à Jésus : « Thomas lui répondit… »
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Au commencement, la Parole existait déjà. La Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu. […] Personne n’a jamais vu Dieu; Dieu le Fils unique, qui est dans l’intimité du Père, est celui qui l’a fait connaître.
Jn 1.1,18
Je sais que la traduction des Témoins de Jéhovah est différente dans ces versets, et bien que je puisse expliquer le problème avec cette traduction, je veux simplement constater que le mot θεος est appliqué à Jésus. Or ce mot n’est jamais utilisé dans le Nouveau Testament pour parler d’un ange. Θεος dans le Nouveau Testament est soit le vrai Dieu, soit un faux dieu (une fois Satan, 2 Cor 4.4), mais le sens que les traducteurs de la TdNM veut donner à ce mot en Jean 1.1 et 1.18 n’est pas attesté en aucun autre passage.
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Pour vous, vous ne vivez pas selon la chair, mais selon l’esprit, si du moins l’Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu’un n’a pas l’Esprit de Christ, il ne lui appartient pas. Rom 8.9-10
Dans la même souffle, Paul appelle le Saint Esprit « l’Esprit de Dieu » et « l’Esprit de Christ. » Mais si l’Esprit de Christ est aussi l’Esprit de Dieu…
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Il y a aussi Rom 9.5, Tite 2.13 et 2 Pi 1.1, mais je passe aux autres textes…
Je suis…
Les Juifs lui dirent: Tu n’as pas encore cinquante ans, et tu as vu Abraham! Jésus leur dit: En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham fût, je suis. Là-dessus, ils prirent des pierres pour les jeter contre lui; mais Jésus se cacha, et il sortit du temple. Jn 8.57-59
L’usage du présent par Jésus dans ce verset est aussi bizarre en grec qu’il ne l’est en français. La réaction des juifs indique clairement la façon dont ils ont compris l’affirmation de Jésus, et comme c’est le cas plusieurs fois dans cet évangile, leur problème n’est pas qu’ils n’ont pas compris son propos, mais qu’ils le rejettent tout en sachant qui il est. Jésus fait référence au nom de Dieu « Je suis » en Exode 3.14 à travers l’usage d’Ésaïe (41.4, 43.10, 43.25, 46.4…). Et ce n’est pas la première fois que Jésus l’utilise dans ce chapitre :
C’est pourquoi je vous ai dit que vous mourrez dans vos péchés; car si vous ne croyez pas ce que je suis, vous mourrez dans vos péchés. Jn 8.24
On sent que la phrase est incomplète ; « si vous ne croyez pas que je suis [que je suis quoi ?], vous mourrez… » Qu’est-ce que nous devons croire que Jésus est pour ne pas mourir dans nos péchés ? Est-ce que nous devons simplement croire que Jésus existe ? Mais c’est clair que ça ne suffit pas ; pleins de gens croient que Jésus a existé qui n’ont pas la moindre foi en lui en tant que Sauveur.
Mais quand nous nous rappelons que Jéhovah a dit : « Vous êtes mes témoins, vous, et mon serviteur que j’ai choisi, afin que vous le sachiez, que vous me croyiez et compreniez que je suis » (És 43.10), ça devient plus clair. Comme les témoins de Jéhovah comprennent que lui, il est « je suis », les disciples de Jésus doivent croire que lui, il est « je suis », et ceux qui ne le croiront pas mourront dans leurs péchés. (Cf. Jn 13.19)
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Dans plusieurs passages dans le Nouveau Testament, un texte de l’Ancien Testament qui parle de Jéhovah est appliqué à Jésus. Ces parallèles sont voulus, et si l’auteur inspiré met Jésus à la place de Jéhovah dans le texte, cette substitution est hautement porteur de sens. Par exemple :
En És 45.23, Jéhovah dit : « Tout genou fléchira devant moi, Toute langue jurera par moi, » et en Phil 2.10-11 : « …afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. »
En És 44.6, Jéhovah dit : « Je suis le premier et je suis le dernier, Et hors moi il n’y a point de Dieu » (cf És 41.4, 48.12), mais Jésus aussi peut dire « Je suis le premier et le dernier » (Rév 1.17). Dans le contexte d’Ésaïe où Jéhovah insiste énergiquement que c’est lui le seul vrai Dieu, il est inimaginable qu’un autre puisse prendre ce titre. Quand Jéhovah dit « Je suis le premier et le dernier, » il entend sans ambiguïté qu’aucun autre ne peut être le premier ou le dernier. Et pourtant, Jésus réclame le même titre pour lui.
En Pierre 3.14-15 nous lisons « N’ayez d’eux aucune crainte, et ne soyez pas troublés; Mais sanctifiez dans vos coeurs Christ le Seigneur, » ce qui fait écho d’Ésaïe 8.12-13 : « Ne craignez pas ce qu’il craint, et ne soyez pas effrayés. C’est Jéhovah des armées que vous devez sanctifier, » És 8.12-13. Christ le Seigneur est mis à la place de Jéhovah. La correspondance en grec est même plus exacte :
1 Pierre 3
τὸν δὲ φόβον αὐτῶν μὴ φοβηθῆτε μηδὲ ταραχθῆτε, κύριον δὲ τὸν Χριστὸν ἁγιάσατε
Ésaïe 8
τὸν δὲ φόβον αὐτοῦ οὐ μὴ φοβηθῆτε οὐδὲ μὴ ταραχθῆτε, κύριον αὐτὸν ἁγιάσατεAprès, on peut aussi discuter Marc 1.2-3 où des textes de Malachie et Ésaïe qui parlent d’un messager qui préparerait le chemin de Jéhovah sont appliqué par Marc à Jean Baptiste qui prépare le chemin de Jésus, ou bien Jean 12.41 où Jean dit qu’Ésaïe a vu la gloire de Jésus en faisant référence au text grec d’Ésaïe 6.1 qui parle justement d’Adonaï. Et n’oublions pas Hébreux 1.10-12 où le texte de Psaume 102.25-27 qui parle de Jéhovah est appliqué à Jésus.
La Trinité n’est pas clairement révélée dans l’Ancien Testament, mais il y a des indices de la divinité de Jésus dans plusieurs textes. Par exemple :
Car un enfant nous est né, un fils nous est donné, Et la domination reposera sur son épaule; On l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père éternel, Prince de la paix. És 9.6
L’enfant à naître (Jésus) portera le titre de « Dieu puissant » qui ne laisse pas d’ambiguïté. Dans le reste de l’Ancien Testament, ces mots אל (Dieu) et גבור (puissant) se trouvent ensemble en 4 versets : Deut. 10.17, Neh 9.32, Is 10.21, Jer 32.18. Chaque fois c’est une référence au seul Dieu véritable, jamais à un être puissant autre que Dieu1.
Je regardai pendant mes visions nocturnes, et voici, sur les nuées des cieux arriva quelqu’un de semblable à un fils de l’homme; il s’avança vers l’ancien des jours, et on le fit approcher de lui. On lui donna la domination, la gloire et le règne; et tous les peuples, les nations, et les hommes de toutes langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle qui ne passera point, et son règne ne sera jamais détruit.
Dan 7.13-14
Dans la vision de Daniel, une figure qui ressemble à un homme, et qui n’est pas l’Ancien des jours, reçoit un royaume mondial ainsi que le service de tous les peuples de la terre. Plusieurs éléments indiquent que cette figure a un statut divin.
Premièrement il vient « avec les nuées du ciel, » et selon d’autres écritures c’est Jéhovah qui « prend les nuées pour son char » (Ps 104.3) et qui se déplace « monté sur une nuée rapide » (És 19.1).
Deuxièmement, il est glorifié dans la présence de l’Ancien de jours alors que Dieu dit : « Je ne donnerai ma gloire à un autre » (És 42.8, 48.11).
Troisièmement, la description de sa domination et de son royaume est le même que la description de ceux de Jéhovah en chapitre 4 du même livre : « [sa] domination est une domination éternelle et [son] règne subsiste de génération en génération » (Dan 4.34). Et plus tard dans le même chapitre 7, le même royaume est celui du Très-Haut (7.27).
Finalement, le service que reçoit le fils de l’homme de la part de tous les peuples est une forme d’adoration que seul Dieu est digne de recevoir. La racine araméen (ּפלח ) apparait deux fois en Esdras (7.19, 7.24) et neuf fois en Daniel (3.12, 3.14, 3.17, 3.18, 3.28, 6.16, 6.20, 7.14, 7.27), chaque fois en référence au service dans le temple, le service de Dieu, ou le refus de servir autre que Dieu. Par exemple, il est dit de Schadrac, Méschac et Abed-Nego qu’ils ont « livré leurs corps plutôt que de servir (פלח) et d’adorer aucun autre dieu que leur Dieu » (3.28).
Il faudrait aussi discuter Jean 5 en profondeur, mais je risque d’écrire beaucoup trop pour vous. Alors je me contente de deux versets qu’il faut prendre en compte :
A cause de cela, les Juifs cherchaient encore plus à le faire mourir, non seulement parce qu’il violait le sabbat, mais parce qu’il appelait Dieu son propre Père, se faisant lui-même égal à Dieu. Jésus reprit donc la parole, et leur dit: En vérité, en vérité, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même, il ne fait que ce qu’il voit faire au Père; et tout ce que le Père fait, le Fils aussi le fait pareillement.
Jn 5.18
Notez que la phrase « se faisant lui-même égal à Dieu » n’est pas les paroles des juifs, mais celle du narrateur, de Jean lui-même. C’est Jean qui affirme, sous l’inspiration du Saint Esprit, que Jésus se faisait l’égal de Dieu, ce qui offensait aux juifs, bien sûr.
Ne vous trompez pas sur « le Fils ne peut rien faire de lui-même » ; le contexte rende parfaitement clair que Jésus ne parle pas d’un manque de pouvoir, mais du fait qu’il n’agit pas indépendamment du Père. Les personnes de la Trinité travaillent toujours en parfaite unité. Et alors, le Fils fait tout ce que fait le Père. Seul Dieu peut faire tout ce que fait Dieu, et le Fils fait tout ce que fait le Père.
Objection 1 : le Fils a été engendré par le Père
Car auquel des anges Dieu a-t-il jamais dit: Tu es mon Fils, Je t’ai engendré aujourd’hui?
Héb 1.5 citant Ps 2.7
Je note tout d’abord que l’auteur entend clairement que Dieu n’a dit ça à aucun ange, mais au Fils. Alors le Fils n’est pas un ange, comme par exemple, Michel.
Quel est le sens d’engendrer ici ? Clairement le sens primaire de procréation n’est pas l’interprétation correcte. Alors engendrer est utilisé d’une façon analogique. On peut suggérer que l’analogie est une analogie d’origine. Le Père engendre le Fils en ce qu’il l’a créé. Le problème avec cette idée est que engendrer et créer sont deux actions fort différentes. J’ai engendré mes enfants, mais ça ne fait pas de moi leur créateur ! Et Dieu a créé les astéroïdes, mais il ne les a pas engendré.
Je propose par contre que l’analogie est une analogie de filiation. C’est à dire, le fait que le Fils a été engendré par le Père ne veut pas dire autre chose que le Fils est le Fils du Père. L’idée est très répandue dans la Bible que le fils de quelqu’un ou quelque chose est celui qui partage les caractéristiques de son « père » Par exemple en Mt 5.45, être des fils du Père veut dire être ceux qui sont comme le Père en aimant leurs ennemis comme il aime les siens. Alors le Fils est le Fils parce que c’est lui qui représente parfaitement le Père, puis qu’il partage la même nature divine (cf. Héb 1.3, Jn 1.18, Col 1.15, Jn 14.7-9) .
What does it mean that Jesus was begotten?
I will tell of the decree: The Lord said to me, “You are my Son; today I have begotten you.
Objection 2 : supériorité
Le Père est plus grand que moi.
Jn 14.28
L’égalité entre le Père, Fils et Saint Esprit est une égalité ontologique. Fondamentalement, tous les trois sont égaux parce qu’ils partagent la même nature divine. En ce sens ontologique nous disons que tous les êtres-humains sont égaux parce qu’ils partagent tous la même nature humaine. Cette égalité ontologique n’empêche pas que le Père ait une place de supériorité parmi les trois personnes divines, comme l’égalité entre tous les hommes n’empêche pas que certains parmi eux aient un statut supérieur aux autres. En 1 Cor 11.3, par exemple, Dieu est le chef (tête) de Christ tout comme l’homme est le chef de la femme. La supériorité indiqué pour l’homme ne nie pas son égalité ontologique avec la femme, et pareillement avec le Père et le Fils
Quant à l’expression אביעד (« Père éternel » ou « Père de l’éternité »), cette expression précise ne se trouve nulle part ailleurs. L’éternité est quand-même liée à Dieu, par exemple dans Ps 90.2 et Is 57.15. Il est difficile de voir comment ce titre peut être approprié pour une créature.